Une petite nouvelle dans la Prée Montalet

Après l'angélique des estuaires sur les bords de Charente, orchidées, loutres et visons d'Europe dans la vallée du Bramerit, un pêcheur savinois, Monsieur GRENON, que nous remerçions d'ailleurs pour sa curiosité et sa présence d'esprit d'avoir prévenu la fédération départementale, a constaté la présence d'une nouvelle espèce de poisson dans les petits canaux de la Prée Montalet.

Il s'agit de la bouvière, petit poisson rarement pris à la ligne mais parfois au carrelet, je rappelle à tous les pêcheurs de bien faire attention à notre nouvel hôte, car, elle est protégée et donc, doit être remise à l'eau !

Afin de mieux la connaitre, je vous laisse lire l'article que nous a gentillement confié Monsieur Yann DAVITOGLU, ingénieur au pôle technique de la FD 17.

Découvrez ce petit poisson avec ses drôles de moeurs, apprenez à bien le reconnaitre et n'oubliez pas qu'il est protégé !

Bruno LOTTE

Une nouvelle venue en Charente-Maritime !

Le fait est assez rare pour être souligné : une nouvelle espèce piscicole d’eau douce vient d’être identifiée en Charente-Maritime : il s’agit de la Bouvière (Rhodeus amarus).

La présence de ce petit Cyprinidé nous a été signalée par un pêcheur naturaliste nouvellement arrivé à Saint-Savinien, qui en a capturé plusieurs individus, au carrelet à main, dans les canaux de la Prairie de Montalet (Saint-Savinien, 17350), début juillet. Même si l’espèce est probablement présente depuis plusieurs années dans le sud du département sur le bassin Isle-Dronne (déjà inventoriée en Gironde et en Dordogne), cette découverte constitue le premier signalement avéré en Charente-Maritime.

La Bouvière en quelques mots…

La Bouvière est un petit poisson (5 à 7 cm en moyenne) qui vit en banc le plus souvent dans des milieux calmes, aux eaux claires, peu profondes et présentant des substrats sablo-limoneux riches en végétation aquatique.

Elle ressemble à une petite Brème ou à un petit Gardon à l’aspect brillant, au dos gris verdâtre et aux flancs argentés présentant au niveau du dernier tiers de son corps une bande vert-bleu caractéristique.

La Bouvière est phytophage et/ou détritivore : elle se nourrit d’algues vertes, d’algues filamenteuses, de phytoplancton et parfois de petits vers, ce qui rend sa capture à la ligne très difficile.

Poisson dont l’activité principale s’effectue le jour, la présence de la Bouvière est directement liée à celle des moules d’eau douce de la famille des Unionidés (Unio et Anodontes) qu’elle utilise lors de sa reproduction. Le frai se déroule d’avril à août dans des eaux de 15 à 21 °C.

Le mâle, ayant revêtu une parure irisée de couleur rose-violacée, défend un territoire autour d’une moule. La femelle, pourvue d’un ovipositeur de près de 6 cm (sorte de petit tuyau), y dépose ses ovules, que le mâle vient féconder. L’éclosion est rapide et les larves sortent de la moule quand elles ont atteint une taille de 8mm environ.

La Bouvière est présente dans le Centre et l’Est de l’Europe et au Nord de l’Asie mineure. En France, ses populations naturelles se concentrent sur les bassins de la Seine et du Rhin, mais elle a depuis longtemps colonisé ceux de la Loire, du Rhône et de la Garonne. Pour ce qui concerne notre population charentaise-maritime, la cause la plus probable de sa présence est d’origine humaine (présence dans des lots de vifs de certains pêcheurs, dans des provenant de piscicultures extra-départementales lors des empoissonnements réalisés par l’AAPPMA locale…).

Même si son aire de répartition métropolitaine a tendance à s’étendre au fil du temps, les populations de Bouvières apparaissent néanmoins très localisées et peu abondantes. En effet, même si sa présence est liée à celle des moules d’eau douce, son abondance serait, quant à elle, directement corrélée à celle de la végétation aquatique. La principale menace pour sa conservation est la dégradation de son milieu de vie (habitats, frayères, qualité de l’eau, continuité écologiques…) et la raréfaction des mollusques d’eau douce résultant en partie de ces dysfonctionnements mais aussi de la prédation hivernale exercée par les Rats musqués et les Ragondins. Vient ensuite la concurrence et/ou la prédation avec d’autres espèces tirant profit de ces altérations et notamment les espèces susceptibles de provoquer des déséquilibres biologiques (Poisson-Chat, Perche soleil, Ecrevisses américaines…).

Compte tenu de ces différentes menaces, la Bouvière bénéficie de mesures de protection au niveau européen (Directive Habitats/Faune/Flore et Convention de Berne) et national (préservation de ses habitats par Arrêté Préfectoral de Protection de Biotope – Arrêté du 08/12//1988). A ce titre, nous conseillons à tout pêcheur capturant une Bouvière de bien vouloir la remettre à l’eau.

Afin de mieux connaître cette population charentaise-maritime, le Pôle Ingénierie Milieux Aquatiques de la Fédération devrait réaliser un inventaire piscicole sur les canaux de la Prairie de Montalet dès l’automne prochain pour caractériser son niveau d’abondance. En 2013, plusieurs sondages spécifiques devraient permettre de définir son aire de répartition sur le département.

Pour finir, nous souhaiterions renouveler nos sincères remerciements au pêcheur qui nous a signalé cette découverte. Par ce témoignage, il aura contribué de manière significative à la meilleure connaissance des populations piscicoles de notre département.

Yann DAVITOGLU